Allah-Mandi, épisode 11
Allah-Mandi parvint à guérir le prince héritier du roi. De part quel miracle ? implorer le Très Haut au nom de ses tant d’années de souffrance et de durs labeurs, de son respect pour le serment prêté. En vrai, le Plus Grand Savant récompense chaque être selon le degré de ses actes et de ses intentions, « misère, chanceux ne te tue pas à cause de la misère, tu ne sais pas comment la misère finira », « l’homme creuse des puits aujourd’hui pour étancher les soifs de demain », dixit les gens du village de Allah-Mandi. Dans cette vie, il ne faut jamais jouer au petit malin. Il n’y a pas de petit, il n’y a pas de grand. Elle, cette vie n’est autre que le passage d’une vie pleine de misère où les gens se haïssent sans raison à une vie éternelle. L’homme doit vivre heureux et pour ne pas connaitre une mauvaise fin et pour ne pas rater la vie future. Tout ça finira un matin ou un soir : sous la poussière, par les vers de terre. Les uns les autres peuvent faire tout ce qui est en leur pouvoir à un moment donné tout en ignorant que le dernier mot revient au Tout Puissant qui est fort et dur en punition de toute hauteur d’orgueil. L’orgueil fut le premier péché de la terre. La richesse, la popularité, le pouvoir rendent le plus souvent l’homme orgueilleux. Il ne finit jamais sans mauvaise fin. Tout se paie sur cette terre avant le jour du Juste jugement du Juge des juges.
Le prince était guéri. L’espace vert bâti en une très belle demeure pour Allah-Mandi. « L’érudit ». Des jours se suivaient. Son nom faisait écho partout à travers le royaume. Les gens finirent par la nommer « la Sainte du Nord ». Les enfants dans leur missions de veille pendant la récolte, les oiseaux dans leurs chants, les poissons dans leur nage, les griots dans leurs rapsodies , qui , ne chantait pas l’honneur de Allah-Mandi ?...
Les membres de son beau frère paralysés, les jambes de l’amie à Saran aussi, le chasseur devenu fou, Saran devenue folle, tous devaient partir se soigner au Nord chez « la Sainte Allah-Mandi » sans s’en rendre compte.
Après de longues années de voyage saint, son mari revint sain et sauf à la maison. Revint-il trouver son jeune frère méconnaissable campé sur un gros caillou en plein cœur de la cour. Dans sa voix et dans son regard, l’on sentait de la commisération. Il avait perdu les dix doigts de ses mains aussi bien que de ses pieds. Les mouches défilaient partout dans la cour. Quel triste sort pour ce jeune homme qui courait plus vite que ses chiens à la traque des animaux sauvages pendant toute son enfance. Et son grand-frère dit :
-Qu’est-ce qui est arrivé à mon frère de lait ? À quel saint se vouer ? que cette vie est pleine de surprises !
El Hadj était revenu du voyage saint. Après les salutations d’usage des gens du village, le jeune frère tituba vers la chambre de son grand frère pour lui annoncer la mort de son épouse, Allah-mandi :
-Quelques semaines après ton départ pour la Mecque, ton épouse, ma belle-sœur nous a malheureusement quittés pour rejoindre nos aïeux. Qu’elle s’en alla si jeune !...nous lui rejoindrons d’un moment à l’autre. Mes condoléances !...sanglota-le jeune frère, s’adressant à l’époux de Allah-Mandi, celle qu’il a chassé avant de continuer, c’est deux lunes plus tard que je suis tombé malade. Mais grand-frère, il y a une « sainte au Nord » qui guérit toute sorte de maladies. Elle a dores-et-déjà soigné des lépreux, des aveugles mêmes des sourds-muets. Ne doit-on partir là-bas nous aussi ?...dit-le jeune frère...
A vendredi prochain !...
Historien du Journal !
Le Coup, le 30 juillet 2021